lundi 28 juillet 2008

Time of Orchids - Sarcast While (Tzadik/2005)

Dans les grands disque d'avant-garde, j'ai déjà parlé de Boredoms. Voilà le tour des grands inconnus que sont Time of Orchids – qui ont d'ailleurs splitté il y a peu mais qui s'en soucie ? Sarcast While est pourtant un grand disque. Imposant et définitif ; compliqué et dur à appréhender. Parce que Time of orchids est un groupe de nerveux. Leur échafaudage est rongé par d'inébranlables tics maladifs, d'inquiétantes pulsions auto-destructrices et la tendance au contre-temps rythmique d'une batterie toujours au bord de la saccade et de l'implosion. Comme ces personnes qui, d'un seul coup, voient leur visage défiguré par des grimaces à la motorisation inconnue.
Musique crispée, polluée par le stress, Sarcast While n'en est pas moins, comme le disait Breton, une musique pétrie d'une beauté convulsive. Une beauté qui se vomit, qui germe et gerbe un peu partout, aux quatre coins d'un math-rock sans rigueur – une suite de chiffres et d'opérations insensées. Aussi rapidement que ça disparaît, le temps d'un instant ou deux, tout le bordel reprend forme, les mélodies se tiennent enfin et les rythmes restent en place. On se dit alors que c'est merveilleux, rien de moins, rien de plus. Et puis ça fout le camp et on attend la prochaine illumination.
Reste que, si l'on possède l'obstination suffisante, on finira par se sentir à l'aise avec cette musique difficile. On la sentira frémir, reculer, se désagréger, avancer un peu et oser plus franchement se confesser. Et il y aura dans ces moments-là moyen de finir pétrifié, comme sur un dernier morceau, All We Ever Wish, qui, dans le dialecte de ces convives de John Zorn – sur son label Tzadik –, n'est rien d'autre qu'une simple chanson d'amour.
Et c'est une fois ému par ce groupe de bègues anxieux que l'on pourra mieux comprendre leur musique, que l'on pourra enfin dire à quoi ça ressemble. À quelque chose comme du progressif industriel. Genre qui n'existe pas mais qui ramène à des mondes connus. C'est déjà ça, et l'on pourra aussi s'amuser à faire un brainstorming des artistes que ça évoque – Aphex Twin et Dillinger Escape Plan ensemble sur Ours, Engendered, Pink Floyd sur It Gone, Dead Can Dance ici, Naked City là, Talk Talk au loin. Des noms qui s'esquissent, qu'on pense toujours rêver. Qui vont et viennent à l'esprit comme vont et viennent les crispations expérimentales de Time of Orchids, déposant l'écume d'un songwriting habité et bouleversé.
5/5

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