Osons le dire franchement : le binôme d'Autechre nous a à force du temps convaincu que leur obstination était pathologique. Chaque nouvelle sortie des Britanniques a été un pas de plus dans un projet têtu et obsessionnel, projet de quitter leur sphère electro-ambient du départ pour arriver à une electro-noise évacuant toute mélodie et tout confort rythmique. Et inexorablement, tout nouvel album d'Autechre est devenu un peu plus une épreuve sportive, réclamant la maîtrise de soi d'un boudhiste et la puissance musculaire d'un héros de force basque. Confield, Draft 7 : 30 et Untilted étaient donc autant de véritables purges, momentanement passionantes mais trop éreintantes à la longue pour qu'on a fasse l'apologie.
Quaristice avait tout pour faire peur. On pensait qu'il fallait à tout prix s'armer de paracétamole pour l'écouter. Les plus fragiles en auront besoin, encore. Par contre, les adorateurs d'Amber, Tri Repetae et même Chiastic Slide pourront s'en passer. Car ce Quaristice-là est bel et bien un bizarre retour aux sources : il est innondé de nappes synthétiques comme on les aime et les rythmes se sont dans tous les sens du termes décomplexés. Fini aussi les morceaux trop longs, les infinies variations nihilistes autour de thèmes hermétiques, Quaristice privilégie un format fragmenté, 20 morceaux généralement courts, des morceaux qui vont droit au but et qui sont soignés des TOC habituellement diagnostiqués chez Autechre.
Ce qui est fort dans Quaristice, et qui en fait le meilleur album de leurs auteurs depuis dix ans, c'est qu'il ne cède en rien sur la folie expérimentale de ses précédesseurs. Bien qu'un vrai lyrisme digital soit retrouvé, tout un tas de morceaux sont d'une aridité inouie, plongeant l'auditeur dans les parasites désespérés d'un Intel dernier cri. Car ce qu'a aussi retrouvé Autechre, c'est finalement une forme de confiance, celle de pouvoir toucher à la grâce dans une épure presque totale, sans assommer l'auditeur d'un nuage de bruits infertiles. Le nouveau Autechre refait donc une place au silence. C'est abyssal et bouleversant ; cette essorage nous manquait.
4,5/5
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