jeudi 14 février 2008

Daniel Darc - Amours suprêmes (Mercury records/2008)

Chaotique est le moindre des adjectifs lorsqu'il s'agit d'écrire la vie de Daniel Darc. Ex-chanteur vedette des Taxi Girl, il connaît sous son propre nom, depuis 1986, une carrière des plus douloureuses. Junkie romantique, il se met au rythme désolé des overdoses et des mutilations, accouchant de disques-blessures qui sont à chaque fois comme des testaments, toujours rendus ridicules par une mort sans cesse ajournée. Maintenant, depuis une poignée d'années, Daniel Darc va mieux. En 2003 est sorti Crève-coeur, et ce fut un succès total, public, critique et presque moral. Accompagné du précieux Frédéric Lo, Daniel Darc y évoquait ses drames, bien sûr, sa détresse stagnante, mais pour la première fois avec sérénité et zests d'espoir. Lors de ritournelles synthétiques et minimalistes, il y dévoilait un équilibre vital largement empreint de foi chrétienne et beatnik.
Dès lors, après ce disque enfin cathartique, Darc a gagné en légèreté. Il a monnayé sa plume auprès de Thierry Amiel, Alizée ou Elisa Tovati. Pour ce nouvel album, Amours suprêmes, il a confié avoir renoncé à ses plus grandes ambitions. Désormais, il ne cherche plus le disque définitif, car d'autres viendront après, car aujourd'hui il peut s'inscrire dans une histoire, laissant à plus tard un jugement dernier qu'il vivait sans cesse. C'est bien là la limite d'Amours Suprêmes, construit dans la continuité de Crève-coeur et paresseux à plus d'un titre. Des redites parsèment ce disque fainéant qui, tant dans l'écriture que dans la composition (avec encore Frédéric Lo), sent quelque peu le réchauffé. Une tendance FM se fait aussi sentir au travers des refrains bien trop grandiloquants de La vie est mortelle, de J'irai au Paradis ou des Remords. On préfère donc les espaces intimistes, dont la très belle ça ne sert à rienRobert Wyatt vient offrir son souffle et son apesanteur.
Amours suprêmes nous laisse dans un dilemne. Il est encore bien au-dessus de la mêlée française et pourtant très faible comparé à son prédécesseur. Mais surtout, son insuffisance tient à ce que son auteur est en rédemption. Daniel Darc, on l'aime donc un peu moins comme artiste, mais, après tout ce qu'il nous a confié sur le fil du rasoir, on peut le laisser se reposer un peu, jouir de son apaisement et le regarder dans sa sieste, le sourire sur nos lèvres.

3/5

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