Difficile, toujours, de parler d'un des groupes que l'on considère sans doute parmi ses préférés. Surtout quand le paradoxe s'installe et que l'on va parler de leur album le moins bon. Leur premier, The Week Never Starts Round Here, n'est qu'un brouillon dont le sens et l'assise ne s'imposent que dans l'après-coup – une fois le groupe séparé et qu'il ne reste plus qu'à regarder dans ses rétros. Arab Strap, duo écossais, a pendant dix ans joué la musique évocatrice que l'on aurait jamais osé rêver. Proches de Belle & Sebabastien (preuve en est leur célèbre dédicace The Boy with the Arab Strap) et de Mogwai (ils s'invitaient les uns les autres sur leurs disques, notamment sur Young Team), Aidan Moffat et Malcolm Middleton ont, à eux deux, crée une formule bicéphale aux effets proprement magiques. Moffat, poète ivre de filles laides et de cul, frère Guiness de Gainsbourg, marmonne des centaines de lignes d'un texte cru et fragilisé par les airs de son compère Middleton ; lui, multi-instrumentiste, armé d'une boîte à rythmes à la vétusté indécente, se charge de créer des atmosphères et des soubresauts synthaxiques. Cette dualité, belle et immortelle dans les enregistrements de Philophobia ou the Red Threat, se voit ici enregistrée en plein work in progress – sorte de caméra embarquée en pleine préparation d 'avant JO : ce sont des foulées prometteuses, des temps de récup et des essais techniques auxquels on assiste. Le relai ne se passe pas toujours – à deux reprises Middleton arrête de jouer, ou Moffat continue à parler une fois la chanson finie, le tout sur plusieurs minutes bizarres. A d'autres moments, Moffat est également obligé de chanter, chose à ne surtout refaire. En somme, les deux se jaugent encore assez mal, et pourtant on sent que déjà quelque chose est en gestation. The Clearing, assaut shoegaze d'un genre nouveau, General Plea of a Girlfriend et Little Girls : voilà trois morceaux qui préfigurent le meilleur, le spleen fou de deux losers à la comptabilité confondante. Que dire de plus, si ce n'est que la seule raison de parler de ce disque, c'est que l'on commence toujours les plus belles histoires par le début.
3.5/5
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